Bulletin d’informations – janvier 2023

Après plus de 2 années sans rencontres, Laurence et Daniel, membres du CA français de l’association, se sont envolés pour Tana en novembre dernier. Ils nous décrivent ces deux semaines, partagées avec Nicolas et l’ensemble de l’équipe, qui furent très intenses et riches d’échanges.

Au fur et à mesure des discussions, des entretiens individuels, des rencontres extérieures, nous avons pu appréhender la réalité actuelle des familles, les problématiques des jeunes et des enfants dans leurs parcours scolaires et projets professionnels, impactés par 3 ans de crises sanitaire et économique et constater le travail d’une équipe en action.

Nous avons écouté avec attention les difficultés de travail, les questionnements et les réflexions de tous pour trouver des solutions adéquates face aux accompagnements compliqués des enfants, des mamans, face aux abandons scolaires, aux grossesses précoces…

Comment orienter les jeunes dans des formations adaptées aux petits niveaux scolaires ou après le bac, comment organiser et remettre en place les actions de prévention et de formation, le soutien scolaire ?… Comment gérer l’accueil des nombreuses demandes de soutien de familles habitant autour du centre ?… 

Les projets ne manquent pas, mais comment les intercaler dans le quotidien déjà bien chargé ?

Ensemble, nous avons revu les priorités et défini les projets d’actions à concrétiser en fonction de la réalité du terrain, des possibilités humaines et financières dont dispose l’équipe. Les plannings hebdomadaires et annuels ont été réorganisés afin de dégager du temps de réflexion pour la mise en place de ces projets et gérer au mieux les événements qui rythment l’année. 

Nous avons retravaillé sur les outils à disposition : fiches d’enquêtes sociales, tableaux, pour faciliter et améliorer le suivi des familles et la gestion financière des actions. Les visites à domicile, en binôme tournant, vont permettre à chaque accompagnateur de découvrir la réalité d’autres quartiers et familles. Le but étant de mieux appréhender les situations et prendre les décisions de façon équilibrée.

La répartition des familles et des responsabilités de chacun au sein de l’équipe, les limites d’accompagnement, l’adaptation du soutien aux besoins, le recentrage de l’action autour du quartier, le regroupement des élèves pour diminuer le nombre d’écoles, l’accueil de stagiaires et l’ouverture vers d’autres associations pour travailler ensemble sur des problématiques communes sont autant d’objectifs de travail existant que tous souhaitent améliorer.

La réunion organisée avec les groupes de jeunes en formation professionnelle et études supérieures a été un beau moment de rencontre et nous a permis d’échanger avec eux sur leurs parcours. Chacun a pu s’exprimer plus ou moins aisément, sur son choix, ses projets, intéressants mais pas toujours réalistes. Nous abordons aussi les contraintes de transport, les difficultés pour trouver des stages, les ressources pour compléter leur bourse en sollicitant la famille ou en partageant les expériences de petits boulots. Nous avons trouvé des jeunes épanouis, heureux d’être entendus et soutenus, revendicatifs aussi, travaillant pour réaliser leurs rêves. Hanitra, ancienne filleule et jeune sage-femme diplômée est venue nous annoncer son embauche définitive dans une clinique privée.

Il reste les jeunes échouant aux examens qui doivent être accompagnés et revoir leurs ambitions pour trouver des solutions et accéder aux filières privées abordables. L’équipe est consciente de l’importance du travail d’information et d’orientation de ces ados à la préparation de leur avenir. C’est une des priorités sur lesquelles nous devons travailler.

Notre présence au Centre nous a permis d’apprécier le fonctionnement de la cantine Mirana qui accueille aujourd’hui 152 élèves. Autant dire que les locaux exigus sont au maximum de leur capacité d’accueil des groupes d’enfants et ados qui arrivent dans un temps imparti. L’efficacité de Lydia et Mamison au ravitaillement et le savoir-faire des cantinières Henriette et Rovatiana à la préparation et distribution des repas nous offre le spectacle réjouissant des élèves qui arrivent et s’installent avec leurs assiettes débordantes, dans un joyeux brouhaha. Ensemble nous avons évoqué les conditions d’accueil et de travail à améliorer ainsi que le coût du repas à revoir pour maintenir la qualité des repas.

Les déplacements à Tana restent incontournables pour comprendre le travail de l’équipe sur place, maintenir un lien de confiance qui nous permet d’avancer ensemble sur nos objectifs communs tout en prenant en compte nos contraintes et exigences respectives. Nous avons été heureux de partager une belle cohésion d’équipe, où chacun s’exprime et reste ouvert aux propositions des uns et des autres.

QUARTIER DÉFAVORISÉ

Le Centre Mirana est situé en bordure du quartier d’ANDOHATAPENAKA, à l’ouest de Tana, dans la zone d’anciennes rizières remblayées et inondées à chaque cyclone, sur une longue avenue à la circulation dense et hétéroclite où voitures, bus bondés scooters, charrettes à bras, se disputent la voie. Les trottoirs sont bordés d’un côté par un immense marché quotidien et de l’autre par une multitude d’échoppes où s’affairent vendeurs et artisans.

On quitte les rues principales et les bâtiments en bon état pour accéder au coeur du quartier, à pied par de multiples venelles pavées ou en terre battue. Les règles d’urbanisme et les infrastructures défaillantes ont explosé, avec la densification de la population. De nombreuses constructions illicites, masures en briques, en tôles, en bois, de quelques M2, enserrent les maisons  existantes, sur des parcelles étroites, divisées au gré des héritages. 

Les plus démunis louent des baraques, au bord des zones marécageuses ou des canaux d’eaux usées noires, jonchés de détritus et de plastiques innombrables, sur lesquels sont jetées des passerelles de fortune, à l’échelle d’une Venise au dénuement le plus sévère. Des îlots d’habitats rudimentaires émergent çà et là des anciennes rizières abandonnées, tout au bout de chemins et ponts de bois déglingués. Mais la vie grouille de toute part, les enfants sont partout, jouant avec leurs jeux bricolés ou sur le chemin de l’école, uniforme et cartable sur le dos, tandis que des adultes se disputent les espaces libres, vaquant à leurs tâches et leurs boulots quotidiens entre les étals colorés et les gargotes de fortune.

Les écoles du quartier sont à l’avenant, avec des classes surchargées. L’école primaire publique accueille par demie journée, le matin ou l’après-midi, des classes de 50 à 80 dans des salles vétustes et sous équipées, malgré la construction d’un bloc sanitaire flambant neuf offert par l’Unicef !

Implantée depuis longtemps dans le quartier, l’imposante école catholique Victoire Rasoamanarivo accueille une population mixte avec de nombreux élèves issues de familles très pauvres grâce aux soutiens de la paroisse et d’associations partenaires comme la nôtre.

D’autres écoles privées comme le lycée Le Succès accueillent une multitude d’enfants et jeunes à qui elles tentent de prodiguer un enseignement de qualité malgré les difficultés financières et le manque de locaux adéquats et de matériel pédagogique.

D’AUTRES ACTIONS, D’AUTRES ONG

Depuis plusieurs années nous avions le souhait de rencontrer d’autres ONG, travaillant dans les quartiers de Tana, auprès des enfants et populations très démunis afin d’échanger sur nos difficultés, nos actions et nos résultats respectifs.

Lalaina, éducatrice de notre équipe, a été stagiaire dans d’autres organisations durant ses études. Grâce à elle, nous avons rencontré Mickaël, directeur malgache du Centre Mère Enfant de Maisons des Enfants. Ce Centre, géré par une ONG italienne, est situé dans le quartier d’Antohomadinika très défavorisé, et travaille avec des objectifs proches des nôtres, ciblant la santé, la scolarisation, l’alimentation et l’épanouissement des enfants et l’accompagnement des mères.

Nous avons pu comparer nos approches et conforter des initiatives à développer tels que l’accueil de jour des enfants et le soutien scolaire et les actions d’éducation et de formations auprès des jeunes et pour l’autonomie des mamans.

Nous avons aussi pu échanger avec l’équipe du Bureau Pour l’Emploi (BPE), sorte de mission locale pour l’emploi, cofinancé par l’AFD (Agence Française pour le Développement) et la principauté de Monaco. Cette association fédère 13 autres ONG, ayant des buts identiques à savoir amener à l’autonomie des jeunes issus de classes très défavorisées. Mirana est associée à ce projet depuis deux ans. 

Le BPE sélectionne et accompagne des jeunes motivés, avec ou sans diplôme professionnel, proposés par les différentes ONG pour les aider à se présenter, découvrir différents métiers au travers de stages avant d’être proposés à l’embauche auprès d’une centaine d’entreprises partenaires dans les domaines de l’hôtellerie-restauration, la mécanique, la couture, les métiers du bâtiment, BTP… Plusieurs de nos jeunes ont débuté ce parcours. Augustin, avec une formation de mécanicien, a été recruté en stage dans un grand garage où il travaille désormais.

Ces échanges avec d’autres associations sont très riches pour nous et surtout pour l’équipe à Tana. Les rencontres et le partage d’expériences  professionnelles, de difficultés, échecs et réussites, sont motivants pour affronter un quotidien souvent compliqué et parfois décourageant. Ils permettent de mener des actions communes mais aussi d’initier et développer des projets propres à chaque structure.

Les rendez-vous à ne pas manquer en 2023 !

MIRANA a toujours besoin de nouveaux parrains et marraines pour répondre aux besoins des enfants de Tana. Merci d’en parler avec vos proches et votre entourage.